Albert Londres aurait-il eu une carte de presse ?

« Est-ce qu’aujourd’hui la commission de la carte d’identité des journalistes professionnels attribuerait la carte de presse à Albert Londres ? » Cette question a été posée lors de la soirée de remise des prix Albert-Londres 2023. Petit exercice de fiction…

Albert Londres et la carte d’identité de journaliste professionnel ? Le lien est anachronique. Le journaliste mythique a vu le jour le 1er novembre 1884 à Vichy et est décédé le 16 mai 1932 dans l’incendie du paquebot qui le ramenait de Chine. La Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels s’est, elle, réunie pour la première fois le 22 mai 1936.

Toutefois, celui qui était parfois appelé le « flâneur salarié » du reportage au long cours fut employé durant de nombreuses années par des journaux comme Le Quotidien, Le Petit Parisien, Le Matin, Excelsior… On relève même dans les archives qu’il fut licencié du Petit Journal sur ordre direct de Georges Clemenceau. Son travail de journaliste est régulier. Il en tire la majeure partie de ses revenus, et ce, de façon salariée : la situation professionnelle d’Albert Londres semble bien correspondre aux critères requis en vue de l’attribution de la carte de presse. La Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels lui aurait donc très probablement attribué une carte de presse, s’il en avait fait la demande, comme l’ont obtenue en 2023 quelque 34 500 journalistes professionnels.

Mais en 2023, Albert Londres aurait peut-être délaissé le stylo pour la caméra. Rien ne nous permet de savoir dans quelles conditions il aurait alors travaillé. Ses reportages auraient-ils été payés en salaire, en droits d’auteurs, sur facture ou au cachet ? Ses temps d’enquête et de repérage auraient-ils été rémunérés ? Ou aurait-il choisi le statut d’intermittent du spectacle pour joindre les deux bouts entre chaque tournage, le temps de se consacrer à la préparation de ses sujets ? Ses commanditaires auraient alors fait l’économie de la rémunération de ce qui constitue pourtant du temps de travail effectif. Dans ce cas, Albert Londres n’aurait pas eu sa carte de presse. Vers qui se serait-il alors tourné ?